Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/41

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souvent, puis classer et perfectionner ce que les ignorants inventent et découvrent ?

Je dis qu’il est phénoménal que des hommes sérieux comme ceux d’il y a cinq mille ans ― (par exemple que les ingénieurs de Rhamsinit, de la onzième dynastie, qui trempaient le cuivre mieux que les armuriers d’Albacète ne trempent aujourd’hui l’acier, si bien que, leur secret ayant été perdu, nous ne pouvons, avec les plus puissants marteaux-pilons de nos usines, forger le moindre de leurs instruments de ce métal) ― il est, dis-je, phénoménal que, parmi des hommes de… cette trempe… enfin, un seul ne se soit pas trouvé qui ait pensé à reproduire sa propre voix d’une manière indestructible !… Après cela, peut-être, mon appareil a-t-il été inventé, dédaigné et oublié. Voici neuf cents ans, paraît-il, que mon téléphone a été mis au rebut dans la vieille Chine, cette patrie archi-séculaire et ressassée des aérostats, de l’imprimerie, de l’électricité, de la poudre, etc, ― et de tant de choses que nous n’avons pas encore découvertes. ― Qui ne sait que l’on a constaté, dans Karnac, des traces de rails datant de trois mille années ? du temps où les peuples ne vivaient que d’invasions ? ― Heureusement qu’aujourd’hui les inventions de l’Homme présentent des garanties de durée « définitive. » ― Certes, on se disait également cela du temps de Nabonassar, du temps même du prince touranien Xixouthros, c’est-à-dire voici environ sept ou huit mille ans, sauf erreur ; ― mais il faut admettre de toute nécessité qu’aujourd’hui ce sera « sérieux. » Pourquoi ? je n’en sais rien. L’essentiel est d’en être bien persuadé, voilà tout. Sans quoi, tout le monde, une fois for-