Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de lui, changea spontanément d’itinéraire et, de son propre chef, au nom de l’effrayante responsabilité qui pesait sur son honneur militaire, se réserva, ne se fiant plus à personne, de ne prévenir qui de droit qu’après l’accomplissement essentiel de la lourde tâche acceptée.

Le Commandeur, pâle et souriant

Assieds-toi, Zacharias : tu es vieux ; ce récit fatigue ta voix. Bois un doigt de ce vin — rutilant et vermeil comme tout cet or, dont tu parles ! — Cela te remettra.

Herr Zacharias, qui a refusé d’un geste, en s’inclinant, et qui semble, peu à peu, se plonger en une sorte de songerie visionnaire

— Sans doute, alors, — au fond de sa mémoire, — se dressa le souvenir d’un impénétrable burg, oublié en de calmes et terribles forêts, longues d’une centaine de lieues, et dont les sentiers, familiers à son enfance, lui parurent praticables à ces étroits chariots qui le suivaient, portant une partie de la fortune de l’Allemagne ! — Sans doute se souvint-il aussi que là, dans ces mêmes forêts, un réceptacle inviolable, exfodié depuis des siècles, — un lieu de ténèbres, aux accès connus de lui seul, pouvait, au moins jusqu’à la paix pro-