Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/122

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des attelages ! — ayant abandonné, à distance d’une ou deux lieues des lisières, le reste de son escorte désormais inutile. — Parvenu en cette contrée inhabitée et si constamment solitaire, le cercle des dangers était franchi.

Comme regardant une hallucination

Au soudain cri de halte proféré par le comte d’Auërsperg, la sinueuse colonne de chariots et de cavaliers s’est arrêtée, et le comte de Thungern, quittant le centre, vient se placer devant le premier attelage. Auërsperg, ayant mis pied à terre, s’est avancé seul, assez loin, reconnaissant ses lignes d’arbres, — et, au détour de quelque antique haie de ramée et de hautes verdures, il a, tout à coup, disparu. — Personne autour de lui. — S’avançant au milieu des ombres tombées, il considère certains rocs voilés de mousse et d’herbes, que son premier regard a discernés des autres pierres chenues de leurs alentours. — Il s’est allongé entre leurs joints, dont le secret lui fut un jour transmis, étant seuls, par son père qui le tenait de l’aïeul. Et, d’une pesée spéciale, faisant crier, sous la terre, la rouille des puissants leviers de jadis, voici que deux de ces énormes roches se sont écartées, laissant à découvert l’entrée séculaire. Se redressant alors, d’un appel il amène vers lui, l’un après l’autre, sous