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Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/127

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fut de rendre impotent le belluaire, au moins pour quelques soirées.

Celui-ci donc se « retira », sur-le-champ, dans la gloire d’une ovation que, si l’on veut bien l’espérer, la lionne dut prendre pour elle.

Dès lors, les fauves jouirent de quelque répit. Ce fut un jubilé dans la cage. Les tringles refroidirent. Une trêve de Dieu sembla tacitement conclue.

La police, dit-on, s’entremit même, dans l’intérêt du dompteur, et suspendit toute reprise publique des hostilités.

Ce nonobstant, voici qu’aujourd’hui l’on nous mande (et triples mailloches aux poings !) que, par une innovation géniale ou tout comme, le bien-avisé directeur du théâtre de la Porte-Saint-M*** se propose d’intercaler, — en sa reprise (vraiment inespérée !) d’une féerie, la Biche aux abois, — quoi ? je vous le donne en mille !… — quatre lions !

— C’est une idée, cela ?… N’est-ce pas ! — Au théâtre, une idée s’appelle un clou.

Donc, au nom de la liberté des théâtres, tel hasardeux entrepreneur d’une scène, hier sortable, de Paris, va, disons-nous, contraindre, à nouveau, le triste cheptel de ses habitués, de ruminer encore cette immortelle féerie, en la pimentant, sans vergogne, de cette tragique pincée de braves lions, — à la femelle du moindre desquels le plus téméraire des spectateurs n’oserait certes pas tendre la main, crainte d’un refus.

Un moment :