Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/239

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du sang et l’écho du bruit vibrait encore, que, déjà le chef sanglant de la victime palpitait entre les mains impassibles du chirurgien de la Pitié, lui rougissant à flots les doigts, les manchettes et les vêtements.

C’était une face sombre, horriblement blanche, aux yeux rouverts et comme distraits, aux sourcils tordus, au rictus crispé : les dents s’entrechoquaient ; le menton, à l’extrémité du maxillaire inférieur, avait été intéressé.

Velpeau se pencha vite sur cette tête et articula, dans l’oreille droite, la question convenue. Si affermi que fût cet homme, le résultat le fît tressaillir d’une sorte de frayeur froide : la paupière de l’œil droit s’abaissa, l’œil gauche, distendu, le regardait.

— Au nom de Dieu même et de notre être, encore deux fois ce signe ! cria-t-il un peu éperdu.

Les cils se disjoignirent, comme sous un effort interne ; mais la paupière ne se releva plus. Le visage, de seconde en seconde, devenait rigide, glacé, immobile. — C’était fini.

Le docteur Velpeau rendit la tête morte à M. Hendreich qui, rouvrant le panier, la plaça, selon l’usage, entre les jambes du tronc déjà inerte.

Le grand chirurgien baigna ses mains dans l’un des seaux destinés au lavage, déjà commencé, de la machine. Autour de lui la foule s’écoulait, soucieuse, sans le reconnaître. Il s’essuya, toujours en silence.

Puis, à pas lents, le front pensif et grave ! — il rejoignit