Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/277

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de ses lions, s’était pensivement, caressé la barbe en écoutant le lord. Après un instant de silence, il accepta.

Sitôt le traité en poche, quelques jours lui suffirent pour s’adjoindre une demi-douzaine de bas-de-cuir, d’un sang-froid et d’une expérience à l’épreuve. Puis, en homme pratique, s’étant dit que, pour enlever à travers les menaçantes étendues d’un tel pays, un éléphant blanc, il était, d’abord, indispensable de le teindre, le dompteur chercha quelle teinture provisoire pourrait le mieux résister aux intempéries éventuelles — et finit par s’approvisionner, tout bonnement, de quelques barils de l’Eau pour barbe et cheveux la plus en vogue chez la gentry. Une fois toutes autres acquisitions nécessaires terminées, un fort navire marchand fut nolisé pour l’expédition et le transport de la bête ; on prévint l’Amirauté : des télégrammes furent adressés au gouverneur anglais d’Assam, l’avertissant de prodiguer toute sa bienveillance à la tentative — et l’on partit.


Environ trois mois après, Mayëris et ses compagnons, arrivés depuis longtemps en Asie, avaient remonté le Sirtang sur un radeau de madriers construit en vue du rapt qu’ils se proposaient d’accomplir. À force d’adresse et de bons hasards, ils étaient parvenus, longeant les solitudes, à quelques milles de la vieille cité sacerdotale précisée sur la carte révélatrice. Lorsque ces veilleurs, sans cesse aux aguets, eurent, eux aussi, aperçu l’animal,