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Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/363

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s’instruisît au loin, chez les sages du Népâl — Akëdysséril, dès que le rappel du jeune prince eut été ordonné par le conseil, résolut de s’affranchir, d’avance, des adversités que le caprice du nouveau maître pourrait lui réserver. Elle conçut le dessein de se saisir, au dédain de tous discutables devoirs, de la puissance royale.

Pendant la nuit du souverain deuil, celle qui ne dormait pas avait donc envoyé, au-devant de Sedjnour, des détachements de sowaris bien éprouvés d’intérêts et de foi pour sa cause, pour elle et pour les outrances de sa fortune. Le prince fut fait captif, brusquement, avec son escorte, — ainsi que la fille du roi de Sogdiane, la princesse Yelka, sa fiancée d’amour, accourue à sa rencontre, faiblement entourée.

Et ce fut au moment où tous deux s’apparaissaient pour la première fois, sur la route, aux clartés de la nuit.

Depuis cette heure, prisonniers d’Akëdysséril, les deux adolescents vivaient précipités du trône, isolés l’un de l’autre en deux palais que séparait le vaste Gange, et surveillés sans cesse par une garde sévère.

Ce double isolement, une raison d’État le motivait : si l’un d’eux parvenait à s’enfuir, l’autre demeurerait en otage et, réalisant la loi de prédestination promise aux fiancés dans l’Inde ancienne, ne s’étant apparus, cependant, qu’une fois, ils étaient devenus la pensée l’un de l’autre et s’aimaient d’une ardeur éternelle.