Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/69

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— faute d’un peu d’âme et de bonne volonté, — le penseur ne doit pas en tenir compte. Ils sont pareils à ces lacs maudits, à ces eaux mortes, dont les vapeurs tuent les oiseaux du ciel, si leurs ailes ne sont pas assez puissantes pour les franchir d’un trait.

« Il est assez pénible de s’en apercevoir ; généralement les cyniques rassis et mûrs se rencontrent dans les castes élevées qui, — à tort ou à raison, — mènent joyeuse vie un peu aux dépens du labeur universel. Cela cessera quand la sape de la justice sera parvenue jusqu’à eux ; mais cela est, quant à présent, et cela fut presque toujours. Ces hommes n’ont d’autre valeur que l’impulsion même qu’ils donnent de par la dispensation de leur fortune. Il faut donc leur montrer une certaine déférence, à cause de cette force dont l’organisation sociale les investit gratuitement, et avec laquelle ils peuvent nuire. Les relations inévitables de chaque jour obligent les âmes élevées à frayer avec ces âmes restées en chemin, sous peine de voir leurs plus simples actions en butte à toute sorte d’impudents commentaires (le monde, prêtant ses petitesses à ses