Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/70

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grandeurs, ne croit pas au désintéressement du génie). C’est sans doute pour ce motif que Tullia Fabriana recevait parfois le flux brillant de cette société dont elle ne pouvait défendre sa vue, mais dont la conscience collective s’arrêtait devant la sienne, comme la mer devant le rocher.

« Ainsi, dans les salons de son palais, sur l’Arno, se rencontraient des princes toscans, de vieux diplomates au front toujours voilé d’une convenable inquiétude, de beaux cavaliers florentins, attachés aux diverses légations, et dont les costumes sombres étaient rehaussés de cordons, de pierreries ou de diverses autres marques de distinction ; de jeunes femmes héritières des plus illustres maisons d’Italie et les grands artistes du temps. Le palais sortait de son ombre sur les quais illuminés ; les flots, diaprés de lueurs, bruissaient aux souffles embaumés de la nuit ; les jardins qui bordaient les péristyles extérieurs étincelaient dans leurs feuillages, et des couples insoucieux et splendides marchaient sur les pelouses et sous les épais orangers. — Ces soirs-là, la belle souveraine s’humanisait et se transfigurait : elle trouvait une parole d’accueil