Page:Villiers de L’Isle-Adam - Le Nouveau-Monde, 1880.djvu/56

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38 ACTE DEUXIEME MOSCONE, la regardant Sangue di Christo ! je n’y comprends plus rien, madame Edith ! Comment ! la traversée est accomplie ; nous som- mes ici ! En Amérique ! A York-Town ! A quelques heures de votre maison ! Vous voici, malgré toutes ces fatigues, plus belle, plus étincelante que jamais, — et toujours ces songeries noires ? Mistress Andrews, accoudée sur sa main fermée, les yeux demi-clos, à elle-même Oh !... Penser que je pouvais choisir entre les meilleurs voiliers anglais ! — Cette lettre de passage, que m’accorda lord Cecil à cette nouvelle de Ruth enfuie sur le brick de France, cette lettre, c’était l’accès... fût-ce d’une frégate de guerre ! On pouvait donner la chasse. — Et aucune voile en croisière, à Auckland ! S’assombrissant encore et comme perdue en une mystérieuse pensée. C’est à croire, par instants, à cette mauvaise étoile que les vieux vagabonds et les ménestrels de l’Ecosse disent s’être allumée sur ma maison depuis l'antique soir où l’un des miens... Elle s’arrête, les yeux fixes, avec horreur : — elle frissonne silencieusement. Fatalité ! MOSCONE, il part, la regardant Je flaire une aventure : — mais que croire ? — Terrible femme ! On ne sait jamais ce qu’elle pense. Mistress Andrews, à part, comme après avoir chassé une pensée obsédante et reprenant sa rêverie Revenir vers quelque port du centre, c’était perdre encore du temps !... Ruth Moore avait six jours sur nous ! — Il a donc fallu se résigner à ce lourd bâtiment qui, seul, ap- pareillait pour la Virginie. —Oh ! si elle était arrivée ? Si