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Page:Vinet - Boutmy - Quelques idées sur la création d'une faculté libre d'enseignement supérieur.djvu/27

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Vaincue et abaissée par l’étranger, déchirée et salie par la guerre civile et servile, en lutte avec une épouvantable et risible souveraineté sortie des égouts de Paris, on pouvait croire la France perdue. Quelques mois se passent, et cette nation écrasée, abandonnée de l’Europe, et prête à s’abandonner elle-même, se relève, se retrouve, se reconnaît et se montre tout à coup au monde entier, — stupéfié par une vitalité si merveilleuse, — s’appuyant d’un côté sur une jeune et vaillante armée, de l’autre sur un monceau d’or, sur des milliards.

Je vous l’avoue, ce spectacle émouvant, imprévu, m’a transformé. Une défiance, qui n’allait point jusqu’à éteindre mon zèle, s’est changée en une confiance qui me presse d’agir. J’ai reconnu que si, à la surface, la société française paraissait frivole et peu soucieuse du devoir, au fond, et comme autant de forces latentes, résidaient l’intelligence, la virilité et l’honneur. Dirigée en ce moment par l’esprit le plus sage, par une habileté consommée, la France est appelée dans peu à reprendre son rang et sa dignité. Mais il faut qu’elle s’instruise, il faut qu’elle travaille : tel est à cette heure le cri de chacun. C’était le nôtre avant les deux guerres, c’est encore le nôtre aujourd’hui, mais avec ceci de particulier que, dans le grand mouvement de rénovation qui agite le pays, nous avons cherché quelque chose d’efficace et de fondamental, et nous avons songé à l’éducation politique de la jeunesse française[1].

Voulez-vous des législateurs, des publicistes, des ad-

  1. V. le projet d’une Faculté libre des sciences politiques, par MM. Boutmy et Vinci.