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dans la nef, qui, comme celles de Clermont et de Limoges, avait été projetée avec des chapelles latérales.

À Narbonne, la sacristie et le trésor sont disposés dans deux des chapelles du chœur, au sud ; c’est encore là un point de ressemblance avec Clermont et Limoges (voy. fig. 46 et 47). Les fenêtres de ces trois monuments furent garnies de vitraux ; mais ceux de la cathédrale de Narbonne, posés seulement pendant le XIVe siècle, ne présentent, dans toutes les chapelles, excepté dans celle de la Vierge, que des grisailles avec entrelacs de couleur et écussons armoyés ; il semble que l’on ait tenu à bannir la sculpture et la peinture de cette église ; aussi est-elle d’un aspect passablement froid. C’est plutôt là l’œuvre d’un savant que d’un artiste. Le sanctuaire de Narbonne, comme celui de Limoges, a conservé sa clôture formée de tombeaux d’évêques (voy. Tombeau). La cathédrale de Narbonne possède encore son cloître du XVe siècle, au flanc sud du chœur, comme celle de Béziers (voy. Cloître), et des dépendances, entre autres une salle capitulaire d’un fort bon style.

Saint-Just de Narbonne est un édifice unique dans cette contrée du sol français et par son style et par ses dimensions ; car les cathédrales du Languedoc sont généralement peu étendues, et la plupart ne sont que des édifices antérieurs aux guerres des Albigeois, réparées ou reconstruites en partie à la fin du XIIIe siècle et pendant le XIVe siècle.

Toulouse, seule peut-être, possédait, au XIIe siècle, une grande cathédrale à nef unique sans collatéraux, autant qu’on peut en juger par le tronçon qui nous reste de ce vaste et bel édifice[1]. Mais Toulouse était, au XIIe siècle, une ville riche, très-populeuse, et fort avancée dans la culture des arts.

Avec celle de Béziers, la cathédrale de Carcassonne[2] est une de celles qui nous présente cette invasion du style ogival, du Nord, dans un monument roman du Midi. Nous donnons (49) le plan de ce curieux monument. La nef et ses deux collatéraux, jusqu’aux transsepts, appartiennent à une église de la fin du XIe siècle. Immédiatement après que Carcassonne eut été réunie à la couronne de France sous saint Louis, l’évêque Radulphe fit construire, à l’extrémité du transsept sud (qui alors était roman et devait avoir l’étendue actuelle), la chapelle teintée en gris sur le plan, en style ogival quelque peu bâtard, et la salle voisine[3]. Au commencement du XIVe siècle, l’évêque Pierre de Roquefort ou Rochefort démolit le chœur, les transsepts romans, et bâtit la partie orientale de la cathédrale que nous

  1. Cette nef dans œuvre n’a pas moins de 24 mètres ; les voûtes sont en arcs d’ogives, portées sur des piles et contrebuttées par des contreforts formant des travées intérieures profondes ou des chapelles entre eux. Il est probable que cette disposition était une de celles adoptées dans ces provinces avant l’invasion du style français, après les guerres des Albigeois.
  2. Aujourd’hui l’église de la Cité, le siége épiscopal ayant, depuis le concordat, été transféré dans la ville basse.
  3. Cette salle a été modifiée au XVe siècle. Le tombeau de l’évêque Radulphe est placé dans la chapelle (voy. Tombeau).