Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 3.djvu/225

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[chéneau]
— 222 —

voyait les eaux à droite ou à gauche des chaperons ; on établit donc bientôt des coffres en pierre évidés mettant les chéneaux supérieurs en communication avec les chaperons. Souvent même, ces coffres en pierre furent doublés de tuyaux de plomb (voy. Conduite). Puis, plus tard, vers la fin du XIIIe siècle, on renonça aux coffres en pierre, qui étaient sujets à s’engorger et à causer des filtrations dans les murs, et on établit sur les arcs-boutants des aqueducs en pierre destinés à porter le chéneau rampant (voy. Arc-boutant, Construction). Les chéneaux rampants pratiqués sur le chaperon des arcs-boutants, arrivés aux pinacles surmontant l’extrémité des contreforts, passaient, dans l’origine, à travers ces pinacles pour être déversés par la gargouille. On ne fut pas longtemps sans s’apercevoir que ces canaux, traversant la maçonnerie, ne pouvaient jamais sécher, qu’ils s’engorgeaient et causaient des filtrations dans la masse des constructions des contreforts ; on prit le parti, vers le milieu du XIVe siècle, de détourner les chéneaux au droit des pinacles, et d’amener ainsi à ciel ouvert les eaux jusqu’aux gargouilles d’extrémité. Quelquefois même, dans les provinces du Nord, en Picardie et en Normandie, ces chéneaux aboutirent à des conduites en plomb habilement ménagées dans la construction (voy. Conduite).

Les chéneaux en pierre, pratiqués à la base des combles, pendant les XIIIe et XIVe siècles, sont généralement creusés à fond de cuve, c’est-à-dire donnant en coupe le profil ci-contre (3) ; les joints sont faits avec soin, ayant une entaille A dans laquelle on coulait quelquefois du plomb ou un ciment très-dur composé de grès pilé et de litharge. Ces chéneaux portent de 0,33 c. à 0,48 c. de largeur (un pied, un pied et demi). Ils sont taillés dans les pierres les plus dures que l’on pouvait se procurer, et il nous a paru que leur concavité, destinée à recevoir les eaux, soigneusement taillée, polie même, était souvent imprégnée d’une matière grasse (peut-être d’huile de lin et de litharge). Nous avons vu même quelques-uns de ces chéneaux qui étaient enduits d’un ciment mince, très-dur et adhérant à la pierre ; pour faire tenir ce ciment, les tailleurs de pierre