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[donjon]
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on arrivait à la plate-forme C taillée dans la colline coupée à pic ; cette plate-forme donnait entrée dans un premier souterrain ascendant, qui aboutissait à une seconde plate-forme D à ciel ouvert. Une coupure E interceptait toute communication avec une troisième plate-forme F. Un pont de bois, que l’on pouvait détruire en cas d’attaque, permettait seul d’arriver à cette troisième plate-forme. De là, par un long souterrain ascendant dont les marches taillées dans la craie et le silex n’ont pas moins de 0,30 c. à 0,40 c. de hauteur, on arrivait, en G, dans la seconde enceinte du donjon, bâti sur le penchant de l’escarpement. En K est tracée la coupe transversale de ce souterrain. Il était absolument impossible de forcer une semblable entrée, et l’assaillant qui se serait emparé du château eût été facilement écrasé par la garnison du donjon. Voyons maintenant comment sont disposées les défenses du donjon proprement dit, placé, à La Roche-Guyon, dans une position exceptionnelle.

Voici (22) le plan, à rez-de-chaussée, de ce donjon. C’est en A que débouche le passage souterrain ; à côté sont disposées des latrines dans l’épaisseur de la chemise. Un petit redan commande l’orifice inférieur du tuyau de chute de ces latrines. Du débouché A pour monter au donjon, il faut se détourner brusquement à droite et monter le degré B qui aboutit à la poterne C. À gauche, on trouve l’escalier à vis qui dessert les étages supérieurs. Le palier devant la poterne, à l’extérieur, était en bois et mobile, ainsi que le ponceau D qui aboutissait au chemin de ronde E, commandant l’escarpement. En P est un puits ; en S, un petit silo destiné à conserver des salaisons[1]. De l’enceinte intérieure du donjon, on débouchait dans l’enceinte extérieure par deux poternes GG′, qui sont intactes. Passant sur une fosse F, les assiégés pouvaient sortir au dehors par la poterne extérieure H, parfaitement défendue par les deux parapets se coupant à angle droit. En I, à une époque assez récente, on a percé une seconde poterne extérieure ; mais, primitivement, la tour I était pleine et formait un éperon épais et défendable du côté où l’assaillant devait diriger son attaque. Un fossé taillé dans le roc entourait la première enceinte, et un système de palissades et de tranchées reliait le donjon à un ouvrage avancé indiqué dans les fig. 8 et 9 de l’article Château. Si nous coupons le donjon longitudinalement sur la ligne OX, nous obtenons la fig. 23.

Dans cette coupe, on voit comme les deux chemises de la tour principale s’élèvent en suivant la pente du plateau pour commander les dehors du côté attaquable, comme ces chemises et la tour elle-même forment éperons de ce côté. De la tour principale, la garnison se répandait sur le chemin de ronde de la seconde chemise au moyen du pont volant indiqué en D au plan ; par une suite de degrés, elle arrivait au point culminant R. Par des portes ménagées dans le parapet de cette seconde enceinte, elle se jetait sur le chemin de ronde de la première, dont

  1. Dans cette petite excavation, les pierres sont profondément pénétrées de sel.