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[menuiserie]
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panneau avec les deux montants ; en G, la section verticale d’une traverse avec deux panneaux et leurs languettes ; en H nous donnons le détail perspectif d’un montant désassemblé, son extrémité supérieure étant en a. Déjà les panneaux sont renforcés dans leur milieu, ainsi que l’indique la section F, et ce sont les baguettes des montants et traverses qui reçoivent entre elles les languettes des panneaux laissés libres d’ailleurs. À la partie inférieure de ces panneaux, des chanfreins poussés sur les traverses remplacent les baguettes, afin de ne point arrêter la poussière. Ces baguettes se joignent d’onglet à la partie supérieure des panneaux et reposent en sifflet sur les chanfreins inférieurs, comme l’indique notre détail perspectif H. Ainsi, les baguettes et chanfreins pouvaient être poussés au guillaume le long des montants et traverses sans arrêts, et les assemblages étaient faits après coup en enlevant des baguettes et chanfreins ce qu’il fallait pour faire les repos et les mortaises. Bien entendu, cette porte, comme les précédentes, est en chêne.

Mais le XIVe siècle avait fait, en menuiserie, des œuvres remarquables ; il nous reste de cette époque des stalles fort belles (voy. stalle), des fragments de boiseries taillés et assemblés de main de maître. L’incurie, l’amour du changement, le faux goût, ont laissé ou fait disparaître un nombre prodigieux de ces œuvres d’art. Il faut aujourd’hui en chercher les débris dans quelques musées, en recueillir quelques traces conservées par de vieilles gravures ou des dessins. La Normandie, la Picardie, la Champagne et la Bourgogne étaient particulièrement riches en beaux ouvrages de menuiserie. Les vantaux de porte, très-simples jusqu’à cette époque, étaient devenus depuis lors un motif de décoration de bois. On renonçait aux applications de bronze, aux pentures de fer très-historiées, aux revêtements de cuir peint, pour donner au bois les formes les plus riches, sans cependant abandonner les principes de la vraie construction qui appartiennent à la menuiserie. Quelquefois alors, on laissait dans ces vantaux des ajours, et s’ils étaient d’une trop grande dimension pour être ouverts à chaque instant, on y pratiquait des guichets, ainsi qu’on a pu le remarquer déjà dans l’exemple donné figure 12 bis.

Voici (14)[1] une de ces portes. Sa membrure se composait de deux montants de rive, de deux traverses haute et basse, d’une large traverse intermédiaire, de deux décharges B formant gâble et de deux montants intermédiaires C, assemblés à mi-bois avec les décharges dans la partie supérieure et servant de dormants au guichet dans la partie inférieure. Les panneaux A, de la partie supérieure, étaient ajourés et vitrés probablement. Pour faire comprendre la construction de ce grand vantail, nous donnons en D la coupe faite sur ab, montrant le chapiteau des montants intermédiaires ; en E la section faite sur cd du gâble ; en F la section faite sur

  1. D’après un dessin provenant de la collection de feu Garneray. Cette porte s’ouvrait sur une des grandes salles de l’abbaye Saint-Ouen, à Rouen, et existait encore, paraîtrait-il, à la fin du dernier siècle.