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ronnés d’une tablette de corniche A recevant les coyaux et l’égoût du toit B (les chéneaux n’étant pas en usage au XIIe siècle) ; élevant un pignon devant cette projection, il fallait, ou que la corniche A se retournât à la base du pignon, ou qu’elle s’arrêtât brusquement au nu du mur, ou qu’elle fût masquée par une saillie ab ; il fallait encore que la tablette couronnant le pignon servit de filet recouvrant la toiture, afin d’empêcher les eaux pluviales de passer entre la face postérieure du pignon et la tuile ou l’ardoise. C’est alors (vers le milieu du XIIe siècle) que les architectes cherchèrent diverses combinaisons plus ou moins ingénieuses pour satisfaire à ces conditions. La plus simple de ces combinaisons, adoptée dans beaucoup d’édifices de la Bourgogne et de la haute Champagne vers le milieu du XIIe siècle, est celle que nous présentons (fig. 6). La corniche des murs goutterots étant prolongée jusqu’au nu du mur pignon, sa saillie recevait les extrémités inférieures du triangle rehaussées en encorbellement de manière à dégager la toiture et à la couvrir au moyen de la saillie a de la tablette. Mais cette tablette, pour ne pas glisser sur la pente du mur triangulaire, devait nécessairement faire corps avec l’assise b, ainsi que l’indique le détail géométral A. Alors le morceau d était assez lourd pour arrêter le glissement des tablettes rampantes e. En faisant tailler cette pierre dans un bloc, les maîtres étaient naturellement obligés de faire tomber le triangle g. Bientôt, au lieu de le jeter bas, ils laissèrent la pierre entière et profitèrent de ce triangle g restant, pour y conserver un petit gable, comme nous l’avons tracé dans le détail B. Cette réserve avait l’avantage de laisser plus de poids à la pierre, d’éviter un évidement, et de donner à l’œil plus de solidité à cette assise d’arrêt.

Dans des constructions élevées avec économie même, nous voyons que les architectes apportent une attention toute particulière à couronner les pignons, afin d’éviter le passage des eaux pluviales entre la couverture et la maçonnerie, sans avoir jamais recours à ces solins de mortier ou de plâtre qui se détachent facilement, nécessitent des réparations incessantes et ont un aspect misérable. Quelquefois la tuile vient recouvrir les rampants du pignon, mais au sommet est posée une pierre d’amortisse-