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[ ÉPÉE ]
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Anglais, en 1351, il y eut une première mêlée suivie d’un repos, car tous étaient hors d’haleine.

« Quand ils furent ainsi rafraischis, le premier qui se releva fit « signe et rappela les autres. Si recommença la bataille si forte « comme en devant, et dura moult longuement : et avoient courtes « espées de Bordeaux roides et aiguës, et épieux, et dagues, et les « aucuns haches ; et s’en donnoient merveilleusement grands horions, « et les aucuns se prenoient au bras à la lutte et se frappoient sans « eux épargner. »


Les parties d’armures de plates adoptées dès la fin du xiiie siècle firent renoncer à ces belles lames d’épée cannelées, tranchantes et longues, de la fin du xiie siècle et du commencement du xiiie. Après l’expédition de saint Louis en Égypte et en Syrie, les hommes d’armes usèrent de masses, et ne conservèrent plus que l’épée d’estoc dont parle Joinville. Cette arme demeura courte (75 centim. environ du talon à la pointe) jusqu’au règne de Charles V. Alors les lames s’allongèrent peu à peu, sans modifier la section du fer. Vers la fin du xive siècle, les alemelles avaient 90 centimètres de longueur et quelquefois plus (fig. 14[1]). En A, est donnée la section de la lame au talon ; en B, le pommeau aux deux tiers de l’exécution, et en C l’emmanchement de la garde avec la soie. Les plans de la section sont légèrement convexes, pour donner plus de puissance au fer. La trempe de cette arme est excellente.

Voici (fig. 15) une autre épée de la même époque[2], mais à deux mains, et dont la lame, très-longue, se termine par deux lignes courbes, bien que sa section soit toujours (quadrangulaire (voy. en A). Cette arme, admirable comme exécution, était trop longue pour pouvoir être portée au côté ; elle était attachée à l’arçon et ne servait guère que pour combattre à pied d’estoc et de taille. Son pommeau B et ses quillons sont délicatement forgés. En D, est donné le détail de la prise de la garde sur la lame ; en C, la section, grandeur d’exécution, de la poignée vers son milieu, et en E l’extrémité des quillons. Sur la lame est poinçonnée la fleur de lis G. Le cavalier dont le cheval était renversé dans la mêlée se faisait jour avec cette arme terrible, s’il savait la manier habilement. En faisant le moulinet au-dessus de sa tête, il traçait autour de lui un cercle de deux mètres de rayon au moins.

L’épée se perfectionne encore pendant les premières années du

  1. De l’ancienne collection de M. le comte de Nieuwerkerke (fin du xive siècle).
  2. Provenant de la même collection.