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Page:Viollis - Criquet, 1913.djvu/192

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criquet

touffes vertes inclinées sous les gouttes d’eau rondes, les ormières de boue grasse, l’air glacé qui craque sous les dents, combien y a-t-il de siècles qu’elle ne les a vus, sentis, savourés ?

« Michel est parti avec Suzanne, » songe-t-elle, douloureuse.

Michel ne quitte plus Suzanne : il la guette avec des yeux pointus, tire sa manche, ses cheveux, tâte l’étoffe de sa robe, tourne sans cesse autour d’elle, les doigts à demi-ouverts comme pour la saisir. L’autre jour, il lui a happé la main au passage pour la baiser et sa figure ressemblait à une lampe allumée. Pourquoi ce changement ? L’an dernier, il se moquait de Suzanne, singeait ses mines quand elle se barbouillait de poudre de riz en avançant les lèvres.

— Je voudrais le détester ! lance Criquet.

Naguère si elle avait été fâchée contre lui, elle lui aurait sauté dessus à coups de poing, à coups de pied, elle lui aurait lancé à la figure une brosse, un soulier, l’eau de son verre à dents ; ils se seraient battus, puis réconciliés. Maintenant elle n’en a pas le courage : il ne lui reste aucun courage. Elle qui se vantait de ne jamais pleurer, à présent, elle fond en larmes, sans raison, comme ça… Un petit serrement au cœur, une petite piqûre qui monte dans le nez et cela vient, malgré tous ses efforts : de grosses larmes droites et longues, des gouttes de pluie d’orage qui coulent le long du visage en le lavant comme une éponge. Par