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LE SECRET DE LA REINE CHRISTINE

— Hélas ! il n’est que trop facile de le deviner…

— Oui, le misérable, par vanité, par fatuité de bellâtre, avait fait son confident de ce grimaud ! Je reconnaissais, à peine travestie, la scène d’aveux qui m’a coûté tant de larmes… L’eussè-je encore aimé, il payait de sa vie cette indiscrétion. Mais je ne l’aimais plus… Je le mandai dans ma chambre ; croyant à un retour de ma faveur, il se jeta à mes pieds, saisit ma main, fit briller ses yeux, ses dents, toutes ses séductions de putain. Je lui arrachai cette main et l’en souffletai. Puis, en quatre phrases, je lui mis le nez dans son ordure.

— Et maintenant, lui dis-je, comme l’État n’a pas plus que moi besoin de vous, que vous n’avez commis qu’erreurs et indélicatesses, retirez-vous dans vos terres. Personne ne vous regrettera et moi moins que personne. Allez, Monsieur !

— Était-il aujourd’hui à la séance de la Diète ?

— Oui, je l’y ai aperçu tout à l’heure. Toujours beau, mais quel air de hargne, de sombre défi ! Pauvre Marie-Euphrosyne, je n’envie pas son sort ! Je l’ai donc revu sans nul émoi. Ou si mon cœur a tressailli, ce n’est point à cause de cette tête vide, de ce cœur sec, de cette âme infestée d’intrigues et d’ambitions, mais au souvenir de ma jeunesse, de mon premier, de mon grand et jusqu’ici de mon unique amour. Quant à Magnus lui-même, qu’il aille ou reste au diable, et n’en parlons plus.