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Page:Viollis - Le secret de la reine Christine, 1944.djvu/149

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le secret de la reine christine

— Je regrette, mon jeune seigneur, mais je viens justement de donner mes deux dernières chambres ; le roi lui-même surviendrait que je ne pourrais pas le coucher ; quant à ce qui est de souper, ce n’est pas la nourriture qui manque, pardieu ! C’est la place ; mais si vous trouvez à vous accommoder autour d’une de ces tables…

Et sans daigner remarquer les sourcils froncés de Christine et son piétinement d’impatience, qui ne convenaient ni à sa jeunesse ni à son médiocre équipage, l’hôte reprit son broc et se remit à servir les clients.

La jeune fille, habituée à d’autres égards, allait éclater quand Clairet la prévint, en la tirant par la manche, qu’un esclandre n’était pas opportun. En même temps, au fond de la pièce, quelqu’un se levait et lui faisait de grands signes d’appel et d’amitié. Toute sa mauvaise humeur s’évanouit alors car elle avait reconnu le bel Italien de la forêt.

— Comment, vous, Chevalier ? s’écriait celui-ci en accourant. Quelle heureuse surprise ! Êtes-vous tout à fait remis de votre petit accident ? Et voulez-vous nous faire le plaisir de soüper avec nous ?

— De grand cœur ! répondit-elle, les yeux rayonnants. Décidément l’aventure continuait !

Quelques minutes plus tard, servis par Jean et par Clairet, nos trois jeunes gens étaient attablés et dévoraient avec leur solide appétit tout neuf, en devisant gaîment.

— Figurez-vous, dit Monaldeschi, que nous espérions être reçus au château de Dronningen, à quelques kilomètres d’ici, mais le châtelain, pour lequel nous avions une lettre, est absent. Nous avons donc dû nous rabattre sur cette hôtellerie. D’où l’heureux hasard oui, pour la seconde fois, nous met en présence.

On parla d’abord du Danemark où les deux Italiens venaient de séjourner ; ils se lamentèrent sur la rudesse des habitants, leur défaut de politesse et de culture.

— De vrais barbares ! s’écria Sentinelli.

— J’aurais mauvaise grâce à vous contredire, fit Christine. C’est la première fois que je mets le pied dans ce pays, pourtant si proche du mien ; mais les Danois sont les perpétuels adversaires et rivaux des Suédois et nous ne les aimons guère.

— La Suède ? dit Monaldeschi. Nous n’aurons, je le crains, pas