qu’elle aimait fort et qui incarnait le type idéal des épouses et des mères suédoises. Pleine de bon sens, vaillante, dévouée à son mari et à ses cinq enfants. L’aîné d’entre eux était ce Charles-Gustave en faveur duquel Christine devait abdiquer plus tard.
On prêtait à Catherine d’ambitieux desseins :
— Elle élève la reine à la brochette pour lui faire épouser son fils, chuchotaient méchamment les pécores de la Cour.
La pauvre Catherine, ainsi calomniée, se contentait d’aimer la petite orpheline comme un de ses enfants, de l’entourer, de la choyer. Celle-ci n’avait pas le caractère facile : capricieuse, volontaire, tyrannique. Mais sa tante n’essayait point de la contraindre ni de la punir.
— Mieux vaut lui parler raison, avec douceur, avec bonté. Non seulement, elle n’est pas méchante, comme on le dit. Mais elle a l’âme héroïque.
Elle donna pour compagnes à Christine ses deux filles, Marie-Euphrosyne et Éléonore, un peu plus jeunes qu’elle et de caractère beaucoup plus facile. Mais les deux petites n’avaient ni l’ardeur à l’étude, ni l’humeur ambitieuse de la reine-enfant.
— Il faut qu’elles travaillent davantage, confiait celle-ci à sa tante. Je ne puis vraiment me mettre à leur pas !
Bientôt elles étaient définitivement distancées et il ne fut plus question d’études en commun. Ni de jeux. Les fillettes étaient trop timides, trop craintives pour la fougueuse Christine, forte et hardie comme un garçon, ne rêvant que folles chevauchées, escalades périlleuses, batailles et rixes. Celle-ci n’eut désormais plus d’amies parmi les filles de son âge.
La douce influence de la princesse Catherine n’en continuait pas moins à s’exercer. Pas pour longtemps, hélas ! Elle mourut alors que Christine n’avait guère plus de douze ans et ce fut pour cette dernière une perte irréparable.
À cette nouvelle, le chancelier Oxenstiern, pensant à l’orpheline dont il était responsable devant le pays, s’écria :
— J’aurais préféré enterrer une seconde fois ma mère plutôt que d’assister à la fin prématurée de cette noble princesse !