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LE SECRET DE LA REINE CHRISTINE

— Vous me faites rougir, Madame ! lui disait parfois son indulgent précepteur Jean Matthiae. Si je ne yous savais si innocente…

— Innocence n’est pas ignorance, mon bon Maître !

Et l’espiègle Christine s’enfuyait en riant de toutes ses dents pointues.

Un jour que le Chancelier Oxenstiern renouvelait, de son ton pompeux, adjurations et admonestations, après avoir souri, la petite reine finit par se fâcher tout rouge :

— Une fois de plus, je vous le répète, je ne veux pas qu’un homme use de moi comme un paysan qui ensemence son champ, s’écria-t-elle en frappant du pied.

— Madame ! De tels propos dans votre bouche !

— Et puis, ignorez-vous qu’il pourrait naître de moi un Néron aussi bien qu’un Auguste ?

Le digne homme en demeura tout pantois.

— `À force d’éducation virile, aurions-nous fabriqué un petit monstre ? confia-t-il à Jean Matthiae.

Pourtant, ces prétendants illustres l’un après l’autre évincés, il en demeurait un que Christine avait longtemps semblé considérer d’un œil favorable : son cousin Charles-Gustave, fils de la tante qu’elle avait tant chérie et du comte palatin Jean-Casimir.