Page:Virgile - Géorgiques, traduction Desportes, 1846, 1.djvu/30

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J’ai vu beaucoup de laboureurs ne semer leurs légumes qu’après en avoir préparé la semence en l’arrosant d’eau nitrée et de marc d’huile d’olive, afin que, dans leur cosse souvent trompeuse, les grains devinssent plus gros ; mais quelque soin qu’on prît d’accélérer, par une chaleur sage et modérée, la germination de ces semences, j’ai observé que même les mieux choisies et les mieux préparées dégénéraient à la longue, si chaque année un nouveau choix ne mettait à part ce qu’il y avait de plus beau grain. Telle est la loi du destin : tout décroît et s’altère, tout se précipite vers son déclin. Ainsi le nautonnier, luttant de toute la force de ses rames, remonte le courant d’un fleuve ; mais que ses bras lassés s’arrêtent un moment, l’onde aussitôt le maîtrise et l’entraîne avec rapidité.

Il faut aussi que le laboureur observe les étoiles de l’Arcture, et le lever des Chevreaux et le Dragon étincelant, avec le même soin que font les matelots lorsque, retournant dans leur patrie à travers les mers orageuses, ils entrent dans les eaux de l’Hellespont ou du détroit d’Abydos, abondant en coquillages.

Dès que la Balance égale les heures du jour aux heures de la nuit et dispense au monde une égale part d’ombre et de lumière, exercez