Page:Virgile - Géorgiques, traduction Desportes, 1846, 1.djvu/54

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et rapide ; et de quelque côté que Nisus dirige son vol, Scylla, plus prompte, s’échappe et fend de ses ailes l’éther léger. Alors les corbeaux poussent trois ou quatre fois des cris moins rauques, et dans leur demeure élevée, ressentant je ne sais quelle volupté secrète et inaccoutumée, ils s’ébattent entre eux sous la feuillée, joyeux sans doute de retrouver, après l’orage, leur jeune famille et le nid si doux à leur amour. Je suis loin de penser assurément que la faveur des dieux ait mis en eux quelque étincelle de l’esprit prophétique, ou qu’une loi du destin leur ait donné une intelligence supérieure à leur nature ; mais quand les mobiles vapeurs dont l’air est chargé, prenant un autre cours, tour à tour se condensent ou se dilatent sous l’haleine changeante des vents, les êtres animés subissent ces influences diverses, et leurs sensibles organes reçoivent tantôt une impression, tantôt une autre. De là ce concert des oiseaux dans les champs ; de là l’allégresse des troupeaux dans les prairies et ces cris de joie que font entendre les corbeaux.

Si tu observes attentivement la marche du soleil et les phases successives de la lune, jamais tu ne seras trompé sur le temps du lendemain ; jamais tu ne te laisseras prendre à l’apparence insidieuse