Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/15

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prodige. Arrêté et conduit à l’ Abbaye, la veille des massacres de Septembre, il se promenait dans la cour de cette prison avec une foule d’infortunés qui n’avaient pu trouver place dans les cachots, encombrés de victimes. Le chirurgien de la maison, le docteur R…., camarade de collége de M. De Guerle, l’aperçoit, le reconnaît, voit la grandeur du danger qui le menace, et ne balance pas à l’y soustraire, au péril même de ses jours. Il le prend par le bras, se présente avec lui à la porte de la prison ; et, soit négligence, soit méprise de la part du concierge, ils franchissent sans obstacle le formidable guichet. Que l’on est heureux d’avoir à rappeler de pareils traits, à une semblable époque !

Le danger qu’il venait de courir ne refroidit point le zèle de l’intrépide défenseur des doctrines monarchiques. Nous le voyons, sous le Directoire, concourir avec MM. Laharpe, de Fontanes et l’abbé de Vauxcelles à la rédaction du Mémorial, journal trop énergiquement opposé aux principes de ceux qui gouvernaient alors pour ne pas attirer sur ses auteurs l’honneur de la persécution : le Mémorial fut supprimé. Une seule voix libre, sortie du silence de l’oppression générale, suffisait pour épouvanter ces fantômes de rois sur leur trône d’un jour.

Un régime moins affreux avait remplacé celui de la Terreur : le sang, du moins, avait cessé de couler sur l’échafaud. Le fracas des conquêtes, les distractions passagères de la gloire ne couvraient point,