Page:Visan – Lettres à l’Élue, 1908.djvu/140

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dans l’Océan glauque. Derrière ma fuite, les vagues se refermeront, et l’oubli me prendra dans ses brouillards, pour me dérober aux mémoires inquiètes…

Chère petite lampe qui brûliez, humble et fidèle, au seuil de ma nuit et que j’avais pensé éteindre d’un souffle dédaigneux ! À l’heure des adieux, un instant vacillante, vous continuâtes à éclairer un sanctuaire désespéré, et votre souffle de lumière ne se lassa point de trouer l’ombre solitaire, comme une flèche d’or. Ainsi donc, quelque part à travers le monde, une clarté veillait pour moi ; une coupe d’huile essentielle était préparée, comme on dispose, aux confins des horizons désolés, une petite cabane pleine de vivres, qu’on renouvelle avec confiance, afin que l’explorateur égaré, dont on espère toujours le retour, trouve enfin un abri et se repose dans la joie.

Avec quelle tendresse votre lettre d’hier me laisse deviner votre angoisse des anciens jours ! J’aperçois trop tard de combien de