Page:Visan – Lettres à l’Élue, 1908.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui semble une heure la mort envahit les ténèbres ; on pense qu’un spectre va se lever. Puis reprend le bruit affairé de mille petits travaux sans cause. C’était surtout un trot léger sur les feuilles sèches, à intervalles irréguliers. Quand on s’était bien orienté, on fonçait soudain dans la direction sonore, et nous trouvions notre hérisson déjà en boule. Vite, je le roulais dans ma casquette et le portais à la rigole. Ce caractère pointu cédait sous la douche et montrait un fin museau de sanglier sur de jolies pattes d’ours.

Parfois on poussait la cruauté jusqu’à tuer dans leur élan les gambades gracieuses des écureuils voleurs de noix. À notre coup de feu, ces acrobates lâchaient leur trapèze, opéraient un saut périlleux dans le ciel, avant d’étaler sur l’herbe leur pauvre tête ensanglantée, d’où pendait, entre deux incisives blanches, une langue rose. Et lorsqu’on se précipitait vers le mort, ce malin nous laissait d’abord entre les doigts un paquet de puces.