Nos bras tendus voudront franchir l’étroite enceinte,
Pour se répandre au loin sur l’avenir béni,
Unissant, dans l’ampleur de leur geste infini,
Le glaive de Pallas au marbre de Corinthe ;
Mais des chaînes de fer tromperont notre étreinte.
Nos voix voudront crier l’appel désespéré
Aux guerriers inconnus qui veillent sous la tente,
Chevaux sellés et lance au poing, dans une attente
De combattants poudreux sous un ciel altéré ;
Mais ils resteront sourds d’un mal invétéré.
Nos cœurs voudront verser l’huile substantielle
Aux poumons transpercés des soudards vagabonds,
Et le vin balsamique au front des moribonds,
Dont la sueur saillit en lentes kyrielles ;
Mais notre huile sera trop peu matérielle ;
Mais notre vin, celui du bon Samaritain,
Sera trop mielleux ; mais notre voix trop brève ;
Notre geste trop beau ; trop jeune notre rêve ;
C’est pourquoi nous serons tués dès le matin ;
Mais cette fois très fiers et le regard hautain.
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