Page:Vitrac - Victor ou les Enfants au pouvoir, 1929.djvu/97

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soir, il va arriver un malheur. Que je vais te tuer, que tu vas me tuer. Je ne sais pas. Enfin, je sens la mort. Je la sens. Elle est là. Là, à portée de la main.

(Il tourne autour de la chambre en s’échauffant de plus en plus.)

Je la sens, tiens, comme la sueur qui me couvre les mains.

(Il prend un flacon d’eau de Cologne et le brise.)
ÉMILIE, essayant de plaisanter.

Elle sent l’eau de Cologne, ta mort.

CHARLES

Ah non, ne plaisante pas, Émilie, ne plaisante pas — ou… (Il ouvre le tiroir de la table de nuit prend le revolver, met en joue sa femme puis ouvre brusquement la fenêtre et jette l’arme dans le jardin.)

ÉMILIE

Veux-tu que je descende le chercher ?

CHARLES, la tête dans les mains.

C’est Victor ! C’est Victor ! C’est Victor !

(Tout à coup on entend une détonation au dehors.)
ÉMILIE

As-tu entendu ?

CHARLES

Qu’est-ce que c’est ?

(Il ouvre la fenêtre.)
CHARLES, à la fenêtre.

Qu’est-ce qu’il y a ? Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?

UNE VOIX, au dehors.

C’est un pneu, monsieur un pneu qui vient d’éclater.

CHARLES, referme la fenêtre, calmement.

C’est un pneu ! (Long silence.)

CHARLES

Écoute encore, Thérèse… C’est Victor ! C’est sa faute. Mais il y avait Antoine, comprends-moi… C’est encore Victor !