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Page:Vogüé - Cœurs russes, 1893.djvu/37

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partie de toute mon enfance, il figurait dans ma mémoire à la place d’honneur où sont les impressions des joies vives. Du plus loin que je me souvinsse, le colporteur était inséparable des veilles de grandes fêtes. Quelle émotion, quand on entendait la clochette de son cheval au portail ! Il entrait dans le vestibule bien chaud, avec sa pelisse de renard, son odeur de froid, de neige et de misère ; il ouvrait sa balle d’osier à double compartiment : que de trésors logeaient là-dedans ! Toute la maisonnée s’assemblait ; les filles de la cour, les yeux luisants de convoitise, s’étouffaient pour mieux voir, elles fourrageaient à pleines mains les rubans, les broderies, les mouchoirs d’indienne. Moi, je guettais avec impatience le casier du fond, que je connaissais bien, et où les jouets étaient empaquetés. Quand ma poche était vide de monnaie,