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jean d’agrève.

complut à le mettre en relief. Jean passa sans transition de l’isolement contemplatif du carré au brillant tourbillon où s’étourdissait l’Empire finissant. Le jeune marin obtint un vif succès dans un monde que sa supériorité originale séduisit de prime abord ; il y fut distingué, bientôt adopté et choyé par les femmes en vedette aux Tuileries, à Compiègne. C’est presque toujours le cas dans une société frivole, où chacun est las du voisin parce que tous sonnent le même creux ; elle fait grand accueil à l’animal d’une autre espèce, à l’homme qui lui apporte des acquisitions personnelles ; elle se jette sur lui comme l’essaim de frelons sur le nid d’abeilles, pour le vider et s’en assimiler le miel. Jean se laissa vider de bonne grâce. Par une de ces brusques détentes dont il était coutumier, il se livra avec emportement au courant de plaisir qui l’entraînait. À le voir si enragé de fêtes et d’aventures galantes, on eût dit un matelot qui tirait sa bordée.

La fête ne dura guère pour cet invité venu trop tard : vous savez comment elle s’acheva. D’Agrève gagna ses galons de lieutenant de vaisseau au fort d’Issy, où il commandait une compagnie de fusiliers marins. Après la