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aube.

voile de lumière palpable, semble-t-il, flotte toujours sur les cimes des forêts. Et c’est une sensation étrange, quand on gravit les sentiers blottis entre les bruyères et les myrtes, tandis que le pied écrase la lavande, le fenouil, la germandrée, les cent herbes qui saturent l’atmosphère de leurs effluves amers, c’est un paradoxe délicieux, le contraste de l’air si doux avec cette végétation violente, ces plantes de passion âpre et de fort parfum.

Au moindre effort de l’homme, ces vallons fertiles lui rendraient tous les fruits de la zone africaine. L’homme les leur demandera sans doute, il ne tolère plus les perles qui ne rapportent pas. Il demandera le fer et l’argent aux rochers qui continuent à Port-Cros les filons voisins de la mine des Bormettes. La trace de ces métaux est visible dans les éclats de schiste micacé dont tous les chemins de l’île sont pavés, pierres luisantes imprégnées d’une poussière de diamant ; elle gardent leur fulguration dans les bas-fonds des côtes, sous la « mer d’argent », ainsi qu’on nomme à Porquerolles une baie où l’eau dort sur cette armure d’écailles brillantes. L’homme demandera un jour à cette terre priviligiée les trésors qu’elle recèle ; et le charme de Port-