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jean d’agrève.

Cros s’évanouira. Il est fait des libres fantaisies de la nature, il réside surtout dans le chaste abandon, le silence, la paix sereine de cette vierge inviolée. Je la compare sans cesse à ces îles des Sporades, restées en dehors des routes maritimes, où je chassais autrefois en compagnie des bergers grecs. À quelques encâblures des cercles parisiens transportés sur la Corniche, l’Île d’Or me rend mes anciennes impressions de liberté errante dans une oasis sans maître. Elle est si bien préservée de toute intrusion banale, si distante de toutes les choses d’habitude !

Port-Cros ne fut pas toujours aussi solitaire. Au moyen âge, des moines sortis des îles de Lérins colonisèrent la thébaïde où le vent avait poussé leurs barques. La communauté dut être nombreuse, active : d’anciennes ruines attestent sur plusieurs emplacements l’existence de monastères et d’exploitations agricoles. Les Barbaresques envahirent la retraite des cénobites ; chassés des Îles d’Or sous François ier, ces Maures reparurent à maintes reprises, et jusqu’à une époque très récente, dans le poste avancé d’où ils gagnaient les montagnes du continent qui portent leur nom. Pour les tenir en respect, nos