Page:Voiture - Lettres, t. 1, éd. Uzanne, 1880.djvu/268

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ceux qui pour un empire (car c’estoit le prix de cette victoire) ne voulurent pas attendre trois jours ? Vous voyez donc que , pour sauver la maison d’Austriche et pour destourner ses desseins, que Ton dit à cette heure avoir esté si téméraires, il a fallu que la fortune ait fait depuis trois miracles, c’est à dire trois grands évenemens qui, vraysemblablement, ne dévoient pas arriver : la mort du roy de Suéde, celle du duc de Fridlandt et la perte de la bataille de Norlinghen. Vous me direz qu’il ne se peut pas plaindre de la fortune pour l’avoir traversé en cela, puis qu’elle l’a servy si fidellement dans toutes les autres choses ; que c’est elle qui luy a fait prendre des places sans qu’il en eust jamais assiégé auparavant, qui luy a fait commander heureusement des armées sans aucune expérience, qui l’a mené tousjours comme par la main et sauvé d’entre les précipices où il estoit jette, et enfin qui l’a fait souvent paroistre hardy, sage et prévoyant. Voyons-le donc dans la mauvaise fortune, et examinons s’il y a eu moins de hardiesse, de sagesse et de prévoyance. Nos affaires n’alloient pas trop bien en Italie, et, comme c’est le destin de la France de gagner des batailles et de perdre des armées, la nostre estoit fort déperie depuis la dernière victoire qu’elle avoit emportée sur les Espagnols. Nous n’avions gueres plus de bonheur devant Dole, où la longueur du siège nous en faisoit attendre une mauvaise issue, quand on sceut que les ennemis estoient entrez en Picardie, qu’ils avoient pris d’abord la Capelie, le Castelet et