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Page:Volney - Œuvres choisies, Lebigre, 1836.djvu/84

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LES RUINES.

couru la terre, j’ai visité les campagnes et les villes ; et voyant partout la misère et la désolation, le sentiment des maux qui tourmentent mes semblables a profondément affligé mon ame. Je me suis dit en soupirant : L’homme n’est-il donc créé que pour l’angoisse et pour la douleur ? Et j’ai appliqué mon esprit à la méditation de nos maux, pour en découvrir les remèdes. J’ai dit : Je me séparerai des sociétés corrompues ; je m’éloignerai des palais où l’ame se déprave par la satiété, et des cabanes où elle s’avilit par la misère ; j’irai dans la solitude vivre parmi les ruines ; j’interrogerai les monuments anciens sur la sagesse des temps passés ; j’évoquerai du sein des tombeaux l’esprit qui jadis, dans l’Asie, fit la splendeur des États et la gloire des peuples. Je demanderai à la cendre des législateurs par quels mobiles s’élèvent et s’abaissent les empires ; de quelles causes naissent la prospérité et les malheurs des nations ; sur quels principes enfin doivent s’établir la paix des sociétés et le bonheur des hommes. »

Je me tus ; et, les yeux baissés, j’attendis la réponse du Génie. « La paix, dit-il, et le bonheur descendent sur celui qui pratique la justice. Ô jeune homme ! puisque ton cœur cherche avec droiture la vérité, puisque tes yeux peuvent encore la reconnaître à travers le bandeau des préjugés, ta prière ne sera point vaine : j’exposerai à tes regards cette vérité que tu appelles ; j’enseigne-