Un peuple libre législateur
Alors considérant que toute puissance publique était suspendue ; que le régime habituel de ce peuple cessait tout à coup, je fus saisi d’effroi par la pensée qu’il allait tomber dans
la dissolution de l’anarchie. Mais délibérant sans
délai sur sa position, il dit :
" ce n’est pas assez de nous être affranchis des
parasites et des tyrans ; il faut empêcher qu’il n’en
renaisse. Nous sommes hommes ; et l’expérience
nous a trop appris que chacun de nous tend sans
cesse à dominer et à jouir aux dépens d’autrui. Il
faut donc nous prémunir contre un penchant auteur
de discorde ; il faut établir des règles certaines
de nos actions et de nos droits. Or la
connaissance de ces droits, le jugement de
ces actions sont des choses abstraites, difficiles,
qui exigent tout le tems et toutes les facultés
d’un homme. Occupés chacun de nos travaux, nous ne
pouvons vaquer à de telles études, ni exercer par
nous-mêmes de telles fonctions. Choisissons donc
parmi nous quelques hommes, dont ce soit l’emploi
propre. déléguons- leur nos pouvoirs communs
pour nous créer un gouvernement