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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/216

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Dieu, qui formas ses traits, veille sur ton image !
La vertu sur le trône est ton plus digne ouvrage.

Mérope

C'est là ce meurtrier ! Se peut-il qu'un mortel
Sous des dehors si doux ait un coeur si cruel ?
Approche, malheureux, et dissipe tes craintes. 
Réponds-moi : de quel sang tes mains sont-elles teintes ?

Égisthe

Ô reine, pardonnez : le trouble, le respect,
Glacent ma triste voix tremblante à votre aspect.
À Euryclès.
Mon âme, en sa présence, étonnée, attendrie...

Mérope

Parle. De qui ton bras a-t-il tranché la vie ?

Égisthe  

D'un jeune audacieux, que les arrêts du sort
Et ses propres fureurs ont conduit à la mort.

Mérope

D'un jeune homme ! Mon sang s'est glacé dans mes veines.
Ah ! ... t'était-il connu ?

Égisthe

Non : les champs de Messènes,
Ses murs, leurs citoyens, tout est nouveau pour moi.

Mérope 

Quoi ! Ce jeune inconnu s'est armé contre toi ?
Tu n'aurais employé qu'une juste défense ?

Égisthe

J'en atteste le ciel ; il sait mon innocence.
Aux bords de la Pamise, en un temple sacré,
Où l'un de vos aïeux, Hercule, est adoré, 
J'osais prier pour vous ce dieu vengeur des crimes :
Je ne pouvais offrir ni présents ni victimes ;
Né dans la pauvreté, j'offrais de simples voeux,
Un coeur pur et soumis, présent des malheureux.
Il semblait que le dieu, touché de mon hommage,
Au-dessus de moi-même élevât mon courage.
Deux inconnus armés m'ont abordé soudain,
L'un dans la fleur des ans, l'autre vers son déclin.
« Quel est donc, m'ont-ils dit, le dessein qui te guide ?
Et quels voeux formes-tu pour la race d'Alcide ? »  
L'un et l'autre à ces mots ont levé le poignard.
Le ciel m'a secouru dans ce triste hasard :