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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/242

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Le voilà devant vous, et vous l'assassinez !
Son père est mort, hélas ! Par un crime funeste ;
Sauvez le fils : je puis oublier tout le reste ;
Sauvez le sang des dieux et de vos souverains ;
Il est seul, sans défense, il est entre vos mains.
Qu'il vive, et c'est assez. Heureuse en mes misères,
Lui seul il me rendra mon époux et ses frères.
Vous voyez avec moi ses aïeux à genoux,
Votre roi dans les fers.

Égisthe

Ô reine ! Levez-vous,
Et daignez me prouver que Cresphonte est mon père
En cessant d'avilir et sa veuve et ma mère.
Je sais peu de mes droits quelle est la dignité ;
Mais le ciel m'a fait naître avec trop de fierté,
Avec un coeur trop haut pour qu'un tyran l'abaisse.
De mon premier état j'ai bravé la bassesse,
Et mes yeux du présent ne sont point éblouis.
Je me sens né des rois, je me sens votre fils.
Hercule ainsi que moi commença sa carrière :
Il sentit l'infortune en ouvrant la paupière,
Et les dieux l'ont conduit à l'immortalité
Pour avoir, comme moi, vaincu l'adversité.
S'il m'a transmis son sang, j'en aurai le courage.
Mourir digne de vous, voilà mon héritage.
Cessez de le prier, cessez de démentir
Le sang des demi-dieux dont on me fait sortir.

POLYPHONTE, à Mérope.

Eh bien ! Il faut ici nous expliquer sans feinte.
Je prends part aux douleurs dont vous êtes atteinte ;
Son courage me plaît ; je l'estime, et je crois  
Qu'il mérite en effet d'être du sang des rois.
Mais une vérité d'une telle importance
N'est pas de ces secrets qu'on croit sans évidence.
Je le prends sous ma garde, il m'est déjà remis ;
Et, s'il est né de vous, je l'adopte pour fils.

Égisthe

Vous ? M'adopter ?

Mérope

Hélas !

POLYPHONTE

Réglez sa destinée.