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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/295

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Devient folle de vous, et vous tient en contrainte ;
Il vous faut employer et l’audace et la feinte ;
Téméraire en amour et criminel d’État,
Perdant votre raison, vous risquez votre tête.
Vous allez livrer un combat,
Et vous préparez une fête ?

LE DUC DE FOIX

Mon cœur de tant d’objets n’en voit qu’un seul ici.
Je ne vois, je n’entends que la belle Confiance.
Si par mes tendres foins son cœur est adouci,
Tout le reste est en assurance.
Don Pedre périra, Don Pedre est trop haï.
Le fameux Du Guesclin vers l’Espagne s’avance ;
Le fier Anglais notre ennemi,
D’un tyran détesté prend en vain la défense :
Par le bras des Français les Rois font protégés ;
Des tyrans de l’Europe ils domptent la puissance ;
Le sort des Castillans fera d’être vengé
Par le courage de la France.

HERNAND

Et cependant en ce séjour
Vous ne connaissez rien qu’un charmant esclavage.

LE DUC DE FOIX

Va, — tu verras bientôt ce que peut un courage,
Qui sert la patrie et l’amour.
Ici tout ce qui m’inquiète,
C’est cette passion dont m’honore Sanchette,
La fille de notre Baron.

HERNAND

C’est une fille neuve, innocente, indiscrète,
Bonne par inclination,
Simple par éducation,
Et par instinct un peu coquette ;
C’est la pure nature en sa simplicité.

LE DUC DE FOIX

Sa simplicité même est fort embarrassante,
Et peut nuire aux projets de mon cœur agité.
J’étais loin d’en vouloir à cette âme innocente.
J’apprends que la Princesse arrive en ce canton.
Je me rend sur la route, et me donne au Baron
Pour un fils d’Alamir, parent de la maison.
En amour comme en guerre une ruse est permise.