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DE BEUCHOT.

Il devait y avoir de l’arbitraire dans la classification, dans telle ou telle sous-division, de plusieurs écrits, et par conséquent ils ont pu agir à leur arbitre.

On ne doit point oublier surtout quelle était leur position. L’édition ne pouvait se faire en France ; or l’un des éditeurs demeurait à Paris, l’autre à Lille. Ils ne pouvaient ainsi faire toutes les dispositions dont l’idée ne survient souvent que pendant le tirage.

On chercherait, il est vrai, vainement dans l’édition de Kehl les Lettres philosophiques ou sur les Anglais, que la lecture de la correspondance donne tant envie de connaître. Mais ces Lettres avaient été condamnées par arrêt du parlement de Paris, du 10 juin 1734. Or si l’on avait reproduit ces Lettres en corps d’ouvrage, il était à craindre que le parlement, quoique renouvelé en entier, et peut-être plus d’une fois, ne fît, par esprit de corps, exécuter l’arrêt rendu cinquante ans auparavant. En déguisant ou disséminant ces lettres, les éditeurs de Kehl n’avaient fait au reste que suivre l’exemple de Voltaire, qui avait pris ce parti en 1739[1], et qui n’avait jamais osé les faire rétablir sous leur première forme.

Je viens de parler si longuement des éditeurs, que je n’ose entrer dans quelques détails bibliographiques. Je dirai seulement que l’édition in-8o en soixante-dix volumes fut tirée à vingt-huit mille exemplaires, et qu’il y a quelques volumes qui ne sont pas rangés dans le même ordre dans tous les exemplaires.

C’est pour être jointes à l’édition de Kehl in-8o qu’ont été faites cent huit gravures exécutées d’après les dessins de Moreau. Cette première suite, ou collection, parut à la même époque que l’édition in-8o.

Chantreau a eu le courage d’entreprendre des soixante-dix volumes une table analytique, qui a été imprimée en 1801, en deux volumes in-8o. À ceux qui ont des exemplaires où quelques volumes sont disposés autrement que dans l’exemplaire sur lequel Chantreau a fait son travail, sa table paraîtra plus fautive qu’elle n’est réellement. Ce qu’on ne peut lui contester, c’est le mérite d’avoir ouvert la carrière.


XXX. En même temps que l’édition in-8o, on fit à Kehl, sur le même plan, une édition en quatre-vingt-douze volumes in-12, et pour laquelle il n’existe point de table analytique.

Cette édition in-12, tirée à quinze mille exemplaires, a été, ainsi que l’in-8°, imprimée sur cinq papiers de différentes qualités.


XXXI. À mesure qu’une feuille in-8o sortait de la presse à Kehl, elle était, par infidélité, envoyée à Bâle, où on la réimprimait page par page. C’est ainsi que fut faite l’édition de Bâle. Les éditeurs s’étant procuré une soixantaine de lettres inédites de Voltaire, les ajoutèrent dans leur édition, et à leur place. Ce fut le motif pour donner un volume de plus à leur édition, qui est en soixante-onze volumes. Les tomes I à LI sont réimprimés, comme je l’ai dit, page par page. C’est dans les six premiers volumes de la Correspondance générale que sont toutes les lettres nouvelles ; et ces six volumes embrassent un espace de temps qui ne remplit que cinq volumes dans l’édition de Kehl. Pour les volumes suivants, les éditeurs de Bâle reprirent la réimpression page par page. Les différentes divisions de la Correspondance ne sont pas, dans tous les exemplaires de l’édition de Bâle, rangées dans le même ordre que dans l’édition de Kehl ; mais avec un peu d’attention, et en élevant d’une unité le tomage de certains volumes, la table faite par Chantreau pour l’édition in-8o de Kehl peut servir pour l’édition de Bâle.

  1. Voyez la note de Beuchot, tome XXII, pages 79-80.