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DOCUMENTS BIOGRAPHIQUES.

solents contre M. le Régent et Madame la duchesse de Berry, et d’avoir dit que « puisqu’il ne pouvoit se venger de M. le duc d’Orléans, il ne l’épargneroit pas dans ses satires, parce que, ajoutoit-il, Son Altesse royale l’avoit exilé pour avoir publié que sa Messaline de fille étoit une.... »

Signé : d’Argenson ; Deschamps, greffier ; Isabeau, commissaire ;
Bazin, exempt de robe courte.



X.


LETTRE DU COMMISSAIRE ISABEAU,

touchant les papiers prétendus jetés dans les latrines par le sieur arouet fils.

Je me suis transporté, monsieur, en la maison où a été arrêté le sieur Arouet ; et la maîtresse vidangeuse, qui avait été avertie, m’y attendait à deux heures de relevée cejourd’hui avec ses gens. J’ai trouvé refermée la fosse qu’elle avait fait ouvrir hier. Je n’ai pas jugé à propos de la faire ouvrir une seconde fois, parce qu’elle m’a assuré que cette fosse était presque pleine et surnagée d’eau : il ne s’y était néanmoins trouvé aucun papier, et que l’on ne pouvait entrer dedans. Elle m’a assuré aussi qu’elle avait descendu une chandelle dans le tuyau ; qu’elle avait remarqué qu’il était fort net ; et dans lequel il n’y avait aucun papier. Cette fosse a été rebouchée de l’ordre de la principale, que la mauvaise odeur incommodait extrêmement, et à l’occasion de quoi elle a perdu une ou plusieurs pièces de bière qui étaient dans le caveau où s’est faite ladite ouverture. Il y a toute apparence que Fr. Arouet ne convient avoir jeté quelques lettres de femmes que par âcreté d’esprit et pour donner des mouvements inutiles, et que ces lettres, d’un poids fort faible, auraient dû se trouver sur l’eau qui surmonte la matière grossière. Néanmoins, si vous jugez, monsieur, qu’il soit à propos d’y faire rechercher, j’estime que cela ne se pourra faire sans vider entièrement les latrines. J’attendrai vos ordres à ce sujet.

21 mai 1717.
Le commissaire Ysabeau.



XI.


INTERROGATOIRE DE VOLTAIRE[1].

Du 21 mai 1717, 10 heures du matin.

François-Marie Arouet, âgé de vingt-deux ans, originaire de Paris, n’ayant aucune profession, mais son père est payeur de messieurs de la Chambre des

  1. Archives de la Bastille, tome XII, page 89.