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DOCUMENTS BIOGRAPHIQUES.

et Dufresne, pour aller recevoir et préparer le candidat. Celui-ci a été introduit par le F∴ chevalier de Villars, maître des cérémonies de la loge ; et l’instant où il venait de prêter l’obligation a été annoncé par les FF∴ des colonnes d’Euterpe, de Terpsichore et d’Érato, qui ont exécuté le premier morceau de la troisième symphonie à grand orchestre de Guenin. Le F∴ Capperon menait l’orchestre ; le F∴ Chic, premier violon de l’électeur de Mayence, était à la tête des seconds violons ; les FF∴ Salantin, Caravoglio, Olivet, Balza, Lurschmidt, etc., se sont empressés d’exprimer l’allégresse générale de la loge en déployant leurs talents si connus dans le public, et particulièrement dans la respectable loge des Neuf-Sœurs.

Après avoir reçu les signes, paroles et attouchements, le F∴ de Voltaire a été placé à l’orient, à côté du vénérable. Un des FF∴ de la colonne de Melpomène lui a mis sur la tête une couronne de laurier, qu’il s’est hâté de déposer. Le vénérable lui a ceint le tablier du F∴ Helvétius, que la veuve de cet illustre philosophe a fait passer à la loge des Neuf-Sœurs, ainsi que les bijoux maçonniques dont il faisait usage en loge, et le F∴ de Voltaire a voulu baiser ce tablier avant de le recevoir. En recevant les gants de femme, il a dit au F∴ marquis de Villette : « Puisqu’ils supposent un attachement honnête, tendre et mérité, je vous prie de les présenter à Belle et Bonne. »

Alors le V∴ F∴ de Lalande a pris la parole, et a dit :

« T∴ C∴ F∴, l’époque la plus flatteuse pour cette loge sera désormais marquée par le jour de votre adoption. Il fallait un Apollon à la loge des Neuf-Sœurs, elle le trouve dans un ami de l’humanité, qui réunit tous les titres de gloire qu’elle pouvait désirer pour l’ornement de la maçonnerie.

« Un roi dont vous êtes l’ami depuis longtemps, et qui s’est fait connaître pour le plus illustre protecteur de notre ordre, avait dû vous inspirer le goût d’y entrer ; mais c’était à votre patrie que vous réserviez la satisfaction de vous initier à nos mystères. Après avoir entendu les applaudissements et les alarmes de la nation, après avoir vu son enthousiasme et son ivresse, vous venez recevoir dans le temple de l’amitié, de la vertu et des lettres, une couronne moins brillante, mais également flatteuse et pour le cœur et pour l’esprit.

« L’émulation que votre présence doit y répandre, en donnant un nouvel éclat et une nouvelle activité à notre loge, tournera au profit des pauvres qu’elle soulage, des études qu’elle encourage, et de tout le bien qu’elle ne cesse de faire.

« Quel citoyen a mieux que vous servi la patrie en l’éclairant sur ses devoirs et sur ses véritables intérêts, en rendant le fanatisme odieux et la superstition ridicule, en rappelant le goût à ses véritables règles, l’histoire à son véritable but, les lois à leur première intégrité ? Nous promettons de venir au secours de nos frères, et vous avez été le créateur d’une peuplade entière qui vous adore, et qui ne retentit que de vos bienfaits ; vous avez élevé un temple à l’Éternel ; mais ce qui valait mieux encore, on a vu près de ce temple un asile pour des hommes proscrits, mais utiles, qu’un zèle aveugle aurait peut-être repoussés. Ainsi, T∴ C∴ F∴, vous étiez franc-