Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome10.djvu/195

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— Je n’en sentirai rien. — ^ous t’abandonnerons
Aux puissants Langlevieux’, aux immortels Frérons-,
— Ah! bachelier du diable, un peu plus d’indulgence :
Nous avons, vous et moi, besoin de tolérance.
Que deviendrait le monde et la société.
Si tout, jusqu’à l’athée, était sans charité?
Permettez qu’ici-bas chacun fasse à sa tête.
J’avouerai qu’Épicure avait une àme honnête,
Mais le grand Marc-Aurèle était plus vertueux.
Lucrèce avait du bon, Cicéron valait mieux.
Spinosa pardonnait à ceux dont la faiblesse

1. C’est ce même Langlevieux La Beaumelle, dont il est parle dans les notes sur l'épître à M. d’Alembert, et ailleurs.

Ce même homme s’est depuis associé avec Fréron ; et, malgré tant d’horreurs et tant de bassesses, il a surpris la protection d’une personne respectable * qui ignorait ses excès ridicules; mais oportet cognosci malos.

Nous ajouterons à cette note que Ijoileau attaqua toujours des personnes dont il n’avait pa-; le moindre sujet de se plaindre, et que notre auteur s’est toujours borné à repousser les injures et les calomnies des Rollets de son temps. Il y avait deux partis à prendre, celui de négliger les impostures atroces que La Beaumolle a vomies pendant vingt ans, et celui de les relever. Nous avons jugé le dernier parti plus juste et plus convenable. C’est rendre un service essentiel à plus de cent familles, de faire connaître le vil scélérat qui a osé les outrager.

Les ministres d’État, et tous ceux qui sont cliargcs de maintenir l’ordre public, doivent savoir que ces libelles méprisables sont recherchés dans l’Allemagne, dans l’Angleterre, dans tout le nord; qu’il y en a de toute espèce; qu’on les lit avide- ment, comme on y boit pour du vin de Bourgogne les vins faits à Liège; que la faim et la malice produisent tous les jours de ces ouvrages infâmes, écrits quelquefois avec assez d’artifice; que la curiosité les dévore; qu’ils font pendant un temps une impression dangereuse; que depuis peu l’Europe a été inondée de ces scandales; et que plus la langue française a de cours dans les pays étrangers, plus on doit l’employer contre les malheureux qui en font un si coupable usage, et qui se rendent si indignes de leur patrie. (A^ofe de M. de Morza, 1772.)

La Beaumolle s’appelait Langliviel (et non Langlevieux) ; voyez ci-après, la note ’2 de la page 199. (B.)

2. Variante :

A Nonotte, à Joan-Jacque, aux Cléments, aux Frérons.

3. Baruch Spinosa, théologien circonspect, et fort honnête homme; nous l’appe- lons ici Baruch, parce que c’est son véritable nom; on ne lui a donné celui de Benoît que par erreur; il ne fut jamais baptisé. Nous avons fait une note plus longue sur ce sophiste à la suite du petit poëme sur les Systèmes. {Note de M. de Morza, 1772.)

— Vers 1771, les querelles sur les deux parlements, les révolutions du minis- tère, et les disputes sur la cause universelle, augmentèrent le nombre des ennemis de M. de Voltaire; les philosophes parurent un moment vouloir s’unir aux prêtres

  • La personne respectable est Mme du Barry, qui avait fait placer La Beaumelle à la Bibliothèque royale. (G. A.)