qui peuvent déchirer ce tissu, et permettre à la graisse, échappée de ses cellules, de faire des taches blanches sous la peau[1].
Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d’hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu’ils ne doivent point cette différence à leur climat, c’est que des Nègres et des Négresses, transportés dans les pays les plus froids, y produisent toujours des animaux de leur espèce, et que les mulâtres ne sont qu’une race bâtarde d’un noir et d’une blanche, ou d’un blanc et d’une noire.
Les Albinos sont, à la vérité, une nation très-petite et très-rare : ils habitent au milieu de l’Afrique ; leur faiblesse ne leur permet guère de s’écarter des cavernes où ils demeurent, cependant les Nègres en attrapent quelquefois, et nous les achetons d’eux par curiosité. J’en ai vu deux, et mille Européans en ont vu. Prétendre que ce sont des Nègres nains, dont une espèce de lèpre a blanchi la peau, c’est comme si l’on disait que les noirs eux-mêmes sont des blancs que la lèpre a noircis. Un Albinos ne ressemble pas plus à un Nègre de Guinée qu’à un Anglais ou à un Espagnol. Leur blancheur n’est pas la nôtre ; rien d’incarnat, nul mélange de blanc et de brun ; c’est une couleur de linge, ou plutôt de cire blanchie ; leurs cheveux, leurs sourcils, sont de la plus belle et de la plus douce soie ; leurs yeux ne ressemblent en rien à ceux des autres hommes, mais ils approchent beaucoup des yeux de perdrix. Ils ressemblent aux Lapons par la taille, à aucune nation par la tête, puisqu’ils ont une autre chevelure, d’autres yeux, d’autres oreilles ; et ils n’ont d’homme que la stature du corps, avec la faculté de la parole et de la pensée dans un degré très-éloigné du nôtre. Tels sont ceux que j’ai vus et examinés[2].
Le tablier que la nature a donné aux Cafres, et dont la peau
- ↑ Voyez Essai sur les Mœurs, chapitre CXLI.
- ↑ Voyez, dans l’Histoire naturelle de M. de Buffon (supplément, tome IV, page 559, édition du Louvre), la description d’une Négresse blanche amenée en France, et née dans nos îles de père et mère noirs. Au reste, ce dernier fait n’est prouvé que par des certificats dont l’autorité, très-respectable dans les tribunaux, l’est très-peu en physique. (K.)
— Les albinos, pas plus que les géants ou les nains, ne constituent une race particulière. Buffon lui-même partagea longtemps l’erreur de Voltaire. Ce ne fut que quarante ans après la publication de son grand ouvrage qu’il exprima, sous forme de conjecture, que l’albinisme ne paraît être qu’une variété accidentelle de l’espèce. Aujourd’hui cette conjecture est devenue une certitude. (G. A.)