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HENRI L’OISELEUR.

voisins, sont repoussés. Son prédécesseur Conrad s’était soumis à payer un tribut aux Hongrois, et Henri l’Oiseleur le payait encore. Il affranchit l’Allemagne de cette honte.

Depuis 930 jusqu’à 936. On dit que des députés des Hongrois étant venus demander leur tribut, Henri leur donna un chien galeux. C’était une punition des chevaliers allemands, quand ils avaient commis des crimes, de porter un chien l’espace d’une lieue. Cette grossièreté, digne de ces temps-là, n’ôte rien à la grandeur du courage. Il est vrai que les Hongrois viennent faire plus de dégât que le tribut n’eût coûté ; mais enfin ils sont repoussés et vaincus.

Alors il fait fortifier des villes pour tenir en bride les barbares. Il lève le neuvième homme dans quelques provinces, et les met en garnison dans ces villes. Il exerce la noblesse par des joutes et des espèces de tournois : il en fait un, à ce qu’on dit, où près de mille gentilshommes entrent en lice.

Ces tournois avaient été inventés en Italie par les rois lombards, et s’appelaient battagliole.

Ayant pourvu à la défense de l’Allemagne, il veut enfin passer en Italie, à l’exemple de ses prédécesseurs, pour avoir la couronne impériale.

Les troubles et les scandales de Rome étaient augmentés. Marozie, fille de Théodora, avait placé sur la chaire de saint Pierre le jeune Jean XI, né de son adultère avec Sergius III, et gouvernait l’Église sous le nom de son fils. Les vicaires de Jésus étaient alors les plus scandaleux et les plus impies de tous les hommes ; mais l’ignorance des peuples était si profonde, leur imbécillité si grande, leur superstition si enracinée, qu’on respectait toujours la place quand la personne était en horreur. Quelques tyrans qui accablassent l’Italie, les Allemands étaient ce que Rome haïssait le plus.

Henri l’Oiseleur, comptant sur ses forces, crut profiter de ces troubles ; mais il mourut en chemin dans la Thuringe, en 936. On ne l’a appelé empereur que parce qu’il avait eu envie de l’être, et l’usage de le nommer ainsi a prévalu.