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OTHON Ier, DIT LE GRAND.

demandé au pape Agapet ce concile, faible ressource contre Hugues le Grand.

Des évêques germains, et Marin, le légat du pape, y parurent comme juges, Othon comme protecteur, et Louis, roi de France, en suppliant. Le roi Louis y demanda justice, et dit : « J’ai été reconnu roi par les suffrages de tous les seigneurs. Si on prétend que j’ai commis quelque crime qui mérite les traitements que je souffre, je suis prêt de m’en purger au jugement du concile, suivant l’ordre d’Othon, ou par un combat singulier. »

Ce triste discours prouve l’usage des duels, l’état déplorable du roi de France, la puissance d’Othon, et les élections des rois. Le droit du sang semblait n’être alors qu’une recommandation pour obtenir des suffrages. Hugues le Grand est cité à ce vain concile : on se doute bien qu’il n’y comparut point.

Ce qui n’est pas moins prouvé, c’est que l’empereur regardait tous les rois de l’Europe comme dépendants de sa couronne impériale : c’est l’ancienne prétention de sa chancellerie, et on faisait valoir cette chimère, quand il se trouvait quelque malheureux roi assez faible pour s’y soumettre.

950. Othon donne l’investiture de la Souabe, d’Augsbourg, de Constance, du Virtemberg, à son fils Ludolphe, sauf les droits des évêques.

951. Othon retourne en Bohême, bat le duc Bol, qu’on appelle Boleslas. Le mot de slas chez ces peuples désignait un chef. C’est de là qu’on leur donna d’abord le nom de slaves, et qu’ensuite on appela esclaves ceux qui furent conquis par eux. L’empereur confirme le vasselage de la Bohême, et y établit la religion chrétienne. Tout ce qui était au-delà était encore païen, excepté quelque marche de la Germanie. La religion chrétienne, exterminée en Syrie, où elle était née, et en Afrique, où elle s’était transplantée, s’établit encore dans le nord de l’Europe. Othon pensait dès lors à renouveler l’empire de Charlemagne : une femme lui en fraya les chemins.

Adélaïde, sœur d’un petit roi de la Bourgogne transjurane, veuve d’un roi ou d’un usurpateur du royaume d’Italie, opprimée par un autre usurpateur, Bérenger II, assiégée dans Canosse, appelle Othon à son secours. Il y marche, la délivre, et, étant veuf alors, il l’épouse. Il entre dans Pavie en triomphe avec Adélaïde. Mais il fallait du temps et des soins pour assujettir le reste du royaume, et surtout Rome, qui ne voulait point de lui.

952. Il laisse son armée à un prince nommé Conrad, qu’il a fait duc de Lorraine, et son gendre ; et, ce qui est assez commun