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ANNALES DE L’EMPIRE.

la restitution de toutes les villes de l’État ecclésiastique et de la comtesse Mathilde, et demande à l’empereur l’hommage de Naples et de Sicile.

1245. Innocent IV, sur le refus de l’empereur, assemble à Lyon le concile indiqué par Grégoire IX ; c’est le treizième des conciles généraux.

On peut demander pourquoi ce concile se tint dans une ville impériale : cette ville était protégée par la France ; l’archevêque était prince ; et l’empereur n’avait plus dans ces provinces que le vain titre de seigneur suzerain.

Il n’y eut à ce concile général que cent quarante-quatre évêques ; mais il était décoré de la présence de plusieurs princes, et surtout de l’empereur de Constantinople, Baudouin de Courtenai, placé à la droite du pape. Ce monarque était venu demander des secours qu’il n’obtint point.

Frédéric ne négligea pas d’envoyer à ce concile, où il devait être accusé, des ambassadeurs pour le défendre. Innocent IV prononça contre lui deux longues harangues dans les deux premières sessions. Un moine de l’ordre de Cîteaux, évêque de Carinola, près du Garillan, chassé du royaume de Naples par Frédéric, l’accusa dans les formes.

Il n’y a aujourd’hui aucun tribunal réglé auquel les accusations intentées par ce moine fussent admises. L’empereur, dit-il, ne croit ni à Dieu ni aux saints ; mais qui l’avait dit à ce moine ? L’empereur a plusieurs épouses à la fois ; mais quelles étaient ces épouses ? Il a des correspondances avec le Soudan de Babylone ; mais pourquoi le roi titulaire de Jérusalem ne pouvait-il traiter avec son voisin ? Il pense, comme Averroès, que Jésus-Christ et Mahomet étaient des imposteurs ; mais où Averroès a-t-il écrit cela ? et comment prouver que l’empereur pense comme Averroès ? Il est hérétique ; mais quelle est son hérésie ? et comment peut-il être hérétique sans être chrétien ?

Thadée Sessa, ambassadeur de Frédéric, répond au moine évêque qu’il en a menti ; que son maître est un fort bon chrétien, et qu’il ne tolère point la simonie. Il accusait assez par ces mots la cour de Rome.

L’ambassadeur d’Angleterre alla plus loin que celui de l’empereur. « Vous tirez, dit-il, par vos Italiens, plus de soixante mille marcs par an du royaume d’Angleterre ; vous taxez toutes nos églises ; vous excommuniez quiconque se plaint ; nous ne souffrirons pas plus longtemps de telles vexations. » Tout cela ne fit que hâter la sentence du pape. « Je