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ANNALES DE L’EMPIRE.

INTERRÈGNE DE QUATORZE MOIS.

Dans les dernières années de la vie de Henri VII, l’ordre teutonique s’agrandissait, et faisait des conquêtes sur les idolâtres et sur les chrétiens des bords de la mer Baltique. Ils se rendirent même maîtres de Dantzick, qu’ils cédèrent après. Ils achetèrent la contrée de Prusse nommée Pomérélie d’un margrave de Brandebourg qui la possédait.

Pendant que les chevaliers teutons devenaient des conquérants, les templiers furent détruits en Allemagne, comme ailleurs ; et quoiqu’ils se soutinssent encore quelques années vers le Rhin, leur ordre fut enfin entièrement aboli.

1314. Le pape Clément V condamne la mémoire de Henri VII, déclare que le serment que cet empereur avait fait, à son couronnement dans Rome, était un serment de fidélité, et par conséquent d’un vassal qui rend hommage.

Il casse la sentence de Henri VII portée contre le roi de Naples, « attendu, dit-il avec raison, que le roi Robert est notre vassal ».

Mais le pape ajoute à cette raison des clauses bien étonnantes. « Nous avons, dit-il, la supériorité sur l’empire, et nous succédons à l’empereur pendant la vacance, par le plein pouvoir que Jésus-Christ nous a donné. » Il faut avouer que Jésus-Christ, comme homme, ne se doutait pas qu’un prêtre qui se disait dans Rome successeur de Simon fût un jour, de droit divin, empereur pendant la vacance.

En vertu de cette prétention le pape établit le roi de Naples, Robert, vicaire de l’empire en Italie. Ainsi les papes, qui ne craignent rien tant qu’un empereur, aident eux-mêmes à perpétuer cette dignité, en reconnaissant qu’il faut un vicaire dans l’interrègne ; mais ils nomment ce vicaire pour se faire un droit de nommer un empereur.

Les électeurs en Allemagne sont longtemps divisés. Il était déjà établi dans l’opinion des hommes que le droit de suffrage n’appartenait qu’aux grands-officiers de la maison, c’est-à-dire aux trois chanceliers ecclésiastiques, et aux quatre princes séculiers. Ces officiers avaient longtemps eu la première influence. Ils déclaraient la nomination faite par la pluralité des suffrages : peu à peu ils attirèrent à eux seuls le droit d’élire.

Cela est si vrai que le duc de Carinthie, Henri, qui prenait