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ANNALES DE L’EMPIRE.

Philippe, prince de la maison de Brunsvick, et ses quatre fils, trois princes d’Anhalt, George de Virtemberg, frère du duc Ulric, sont dans cette armée ; on y voit les comtes d’Oldenbourg, de Mansfeld, d’Œttingen, de Henneberg, de Furstemberg, beaucoup d’autres seigneurs immédiats à la tête de leurs soldats. Les villes d’Ulm, de Strasbourg, de Nordlingue, d’Augsbourg, y ont envoyé leurs troupes. Il y a huit régiments des cantons protestants suisses. L’armée était de plus de soixante mille hommes de pied, et de quinze mille chevaux.

L’empereur, qui n’avait que peu de troupes, agit cependant en maître, en mettant l’électeur de Saxe au ban de l’empire, le 18 juillet, dans Ratisbonne. Bientôt il a une armée capable de soutenir cet arrêt. Les dix mille Italiens envoyés par le pape arrivent. Six mille Espagnols de ses vieux régiments du Milanais et de Naples se joignent à ses Allemands. Mais il fallait qu’il armât trois nations, et il n’avait pas encore une armée égale à celle de la ligue, qui venait d’être renforcée par la gendarmerie de l’électeur palatin.

Les destinées des princes et des États sont tellement le jouet de ce qu’on appelle la fortune que le salut de l’empereur vint d’un prince protestant. Le prince Maurice de Saxe, marquis de Misnie et de Thuringe, cousin de l’électeur de Saxe, gendre du landgrave de Hesse, le même à qui ce landgrave et l’électeur de Saxe avaient conservé ses États, et dont l’électeur avait été le tuteur, oublia ce qu’il devait à ses proches, et se rangea du parti de l’empereur. Ce qui est singulier, c’est qu’il était comme eux protestant très-zélé ; mais il disait que la religion n’a rien de commun avec la politique.

Ce Maurice assembla dix mille fantassins et trois mille chevaux, fit une diversion dans la Saxe, défit les troupes que l’électeur Jean-Frédéric-Henri y envoya, et fut la première cause du malheur des alliés. Le roi de France leur envoya deux cent mille écus : c’était assez pour entretenir la discorde, et non assez pour rendre leur parti vainqueur.

L’empereur gagne du terrain de jour en jour. La plupart des villes de Franconie se rendent, et payent de grosses taxes.

L’électeur palatin, l’un des princes de la ligue, vient demander pardon à Charles, et se jette à ses genoux. Presque tout le pays jusqu’à Hesse-Cassel est soumis.

Le pape Paul III retire alors ses troupes qui n’avaient dû servir que six mois. Il craint de trop secourir l’empereur, même contre des protestants. Charles n’est que médiocrement affaibli par celle