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RODOLPHE II.

puisqu’il ne put empêcher son frère l’archiduc Mathias d’accepter le gouvernement des Pays-Bas de la part des confédérés qui étaient en armes contre Philippe II : de sorte qu’on voyait d’un côté don Juan d’Autriche, fils naturel de Charles-Quint, gouverneur au nom de Philippe II en Flandre ; et de l’autre, son neveu Mathias à la tête des rebelles, l’empereur neutre, et l’Allemagne vendant des soldats aux deux partis.

Rodolphe ne se remuait pas davantage pour l’irruption que les Russes faisaient alors en Livonie.

1578. Les Pays-Bas devenaient le théâtre de la confusion, de la guerre, de la politique ; et Philippe II, n’ayant point pris le parti de venir de bonne heure y remettre l’ordre, comme avait fait Charles-Quint, jamais cette faute ne fut réparée. L’archiduc Mathias, ne contribuant que de son nom à la cause des confédérés, avait moins de pouvoir que le prince d’Orange, et le prince d’Orange n’en avait pas assez pour se passer de secours. Le prince palatin Casimir, tuteur du jeune électeur Frédéric IV, qui avait marché en France avec une petite armée au secours des protestants, venait avec les débris de cette armée et de nouvelles troupes soutenir la cause des protestants et des mécontents dans les Pays-Bas. Le frère du roi de France Henri III, qui portait le titre de duc d’Anjou, était aussi déjà appelé par les confédérés, tout catholique qu’il était. Il y avait ainsi quatre puissances qui cherchaient à profiter de ces troubles, l’archiduc, le prince Casimir, le duc d’Anjou, et le prince d’Orange, tous quatre désunis ; et don Juan d’Autriche, célèbre par la bataille de Lépante, seul contre eux. On prétendait que ce même don Juan aspirait aussi à se faire souverain. Tant de troubles étaient la suite de l’abus que Philippe II avait fait de son autorité, et de ce qu’il n’avait pas soutenu cet abus par sa présence.

Don Juan d’Autriche meurt le 1er octobre, et on accuse Philippe II son frère de sa mort, sans autre preuve que l’envie de le rendre odieux.

1579. Pendant que la désolation est dans les Pays-Bas, et que le grand capitaine Alexandre Farnèse, prince de Parme, successeur de don Juan, soutient la cause de Philippe II et de la religion catholique par les armes, Rodolphe fait l’office de médiateur, ainsi que son père. La reine d’Angleterre Élisabeth et la France secouraient les confédérés d’hommes et d’argent, et l’empereur ne donne à Philippe II que de bons offices qui furent inutiles, Rodolphe était peu agissant par son caractère, et peu puissant par la forme que l’empire avait prise. Sa médiation est éludée par les